Roman « La Porte du Voyage sans retour », de David Diop

Roman « La porte du voyage sans retour », de David Diop ( Ed. Seuil – 19/08/2021)

Analyse par Françoise Pasco, le 13/02/2022

  Le narrateur est Michel Adanson, naturaliste français du XVIIIème siècle. Il faisait partie de ces savants du siècle des lumières qui partaient sur des bateaux pour le bout du monde afin de découvrir des pays exotiques, leur flore, leur faune, mais aussi leurs peuples, qui étaient à la fois botanistes, zoologues, ethnologues, géographes … et dont le retour était souvent aléatoire.
Après ces études, il part pour le Sénégal, il y passe 5 ans, recueille et étudie plantes, arbres, animaux mais s’intéresse aussi à la sociologie du pays, ce qui n’est pas courant à l’époque où on considérait tous les indigènes de ces pays exotiques comme des sauvages, apprend le wolof.
Dans la première partie, sa fille Aglaé assiste son père dans ses derniers instants. A la mort de son père, elle hérite de toutes ses affaires, livres, écrits (encyclopédie de 160 tomes), plantes, outils de toutes sortes et trouve dans un tiroir caché un carnet dans lequel son père raconte une aventure amoureuse qui lui est arrivée pendant son séjour au Sénégal et qui l’a poursuivi toute sa vie ; là nous entrons dans la fiction.
Et c’est désormais Michel Adanson qui raconte. Dans la première partie de son récit, il voyage avec une escorte, bien sûr, des porteurs … et un jeune homme Ndiak, fils du roi de Waalo, qui lui sert de guide et l’aide dans ses recherches botaniques. Un jour un roi leur parle d’une jeune femme, sa nièce Maram, qui a disparu un jour, vraisemblablement enlevée par les chasseurs d’esclaves et déportée à Gorée, mais 3 ans plus tard un homme se présente à la cour du roi et raconte que Maram est revenue d’Amérique et vit dans un village proche de Gorée, où elle est guérisseuse.
Michel Adanson très intéressé par cette histoire décide de retrouver Maram et sous couvert d’une nouvelle campagne de recherche entreprend un voyage assez mouvementé pour la retrouver. Alors la jeune femme lui raconte la véritable version de sa disparition, et au fil du récit, Adanson tombe follement amoureux d’elle.
L’auteur nous transporte dans le Sénégal du XVIIIème siècle, encore sauvage, éléphants, lions … Forêts d’ébéniers … belles descriptions, dans un style ample, poétique.
Maram, belle, intelligente, est experte dans l’art de soigner par les plantes, un peu sorcière. Elle lui parle de son respect pour la nature, des esprits qui régissent leurs vies, de l’importance de son rab sorte d’ange gardien qui la protège et la conseille dans ses choix de vie. En bon scientifique rationnel, MA ne veut pas y croire mais il est ébranlé dans ses certitudes d’occidental catholique.
Le personnage du narrateur est émouvant, qui confie à sa fille le récit de cet amour qui l’a poursuivi toute sa vie, ses scrupules à faire de Maram sa maitresse ou sa femme, ses regrets et ses remords.
Et puis je me suis beaucoup intéressée à la petite histoire attachée à M. Adanson qui manifestement a intéressé aussi l’auteur puisqu’il y consacre 50 pages, avant d’entrer dans l’histoire elle-même. L’histoire d’Aglaé Adanson est liée à notre ville de Sète, mais serait trop longue à raconter ici ….

 

Roman « Le chemin des estives », de Charles Wright

Roman « Le chemin des estives » , (Flammarion, Janvier 2021, 368 pages)
présenté par Marie Velut, le 11 octobre 2021.

En juillet 2019 Charles et Benoît partent sur le GR4 d’Angoulême à Notre-Dame-des-Neiges en Ardèche. Sans argent, sans tente ni téléphone, ils doivent mendier hébergement et nourriture à chaque étape.

Ce livre est le récit de leur itinérance. Très agréable à lire, fluide et sensible, il nous raconte les difficultés du quotidien à trouver un toit mais aussi la beauté de ce Massif Central traversé.

On y croise Rimbaud, Charles de Foucauld, le silence et surtout une foule d’anonymes accueillants au grand cœur.

Beaucoup de lecteurs peuvent être touchés par ce livre : ceux qui aiment la nature, ceux qui sont curieux de découvrir des points communs entre Rimbaud et Ch. de Foucauld, ceux qui croient à la sobriété et aux choses simples. En clinique pour les malades ce livre peut être une source d’évasion .

 

Roman « La rivière » de Peter Heller

LA RIVIÈRE, de Peter HELLER – (Mai 2021, éd. Actes Sud, 293 pages)
présenté par Mireille Valcarcel, le 11 octobre 2021

Derrière ce titre paisible, en forme de thriller campé en pleine nature sauvage, le romancier américain Peter Heller nous met sous tension de bout en bout en nous embarquant en compagnie de deux étudiants à bord d’un canoë dans les rapides du fleuve Maskwa, dans le Nord du Canada.

L’histoire : Jack et Wynn, deux amis d’enfance ont décidé de réaliser leur rêve : faire une expédition en canoë sur le fleuve Maskwa, au Nord du Canada. Tous deux veulent vivre à fond cette aventure, rêvée et préparée de longue date, « sans précipitation » en prenant le temps de pêcher, de chasser, de cueillir des baies, de regarder les étoiles. La menace d’un gigantesque feu de forêt galopant à pleine vitesse dans leur direction et la rencontre avec un homme ayant abandonné en amont sa femme mourante, transforme leur balade en course contre la montre et leur rêve en enfer.

Ce quatrième roman de Peter Heller, né en 1959 et auteur de La constellation du chien (2013), de Peindre, pêcher et laisser mourir (2015), ou de Céline (2019), est une nouvelle ode à la nature, « si belle et totalement insouciante« , autant qu’ « implacable et violente« , mais aussi une ode à l’amitié – et c’est peut-être avant tout cela que nous devons retenir de ce beau livre….»

Roman « La fille qu’on appelle » de Tanguy VIEL

« La fille qu’on appelle  » de Tanguy Viel – Editions de Minuit – Septembre 2021- 173 pages

par Patricia laurentin, le 12 Octobre 2021

Lundi 11 Octobre 2021, c’était la rencontre autour des livres, autour de notre dynamique animatrice Denise. Nous étions 9 pour voyager autour d’idées souvent convergentes et parfois divergentes, sans aucune animosité : c’est le secret de notre huis clos.

Mon voyage s’est arrêté dans un petit village breton avec « la fille qu’on appelle » de Tanguy Viel.

« La fille qu’on appelle ? lui demande le policier. – Oui, ce n’est pas comme ça qu’on dit « call girl » ? répond la jeune fille de 20 ans. »

Le voyage est intérieur dans ce roman, intime dirions-nous, un huis clos oppressant entre trois personnages : Laura, la jeune fille de 20 ans fière de ses tennis blancs, Max son père, boxeur et chauffeur du Maire, puis le Maire, détenteur du pouvoir, qui les « tient en laisse ». L’expression est de Laura.

« Elle est cruelle, cette histoire », a dit Jacqueline : C’est un peu vrai, car elle ne se termine pas vraiment bien…et on attend la suite !

« Le style n’est pas grammaticalement correct » a dit Annie : Pas faux !  Moi, j’y ai vu de la poésie !

Le roman est très actuel, et comme le dit la revue « Page » : « l’histoire est tragique, scabreuse et réaliste ». J’ai beaucoup aimé… et j’attends le prix littéraire qu’il mérite !