Roman “ASTRA”, de Cedar Bowers

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Par Françoise Pasco, le 4 mars 2023

Un premier roman sorti récemment (janvier 2023) aux éditions Gallmeister qui risque de passer inaperçu et ce serait très dommage ! L’auteure est canadienne, vit à Vancouver, donc la VO est en anglais.

C’est l’histoire de la vie d’une femme, Astra, que l’on suit à travers une douzaine de chapitres, dont chacun raconte un épisode de sa vie mais à travers le regard d’une personne qui l’a croisée ou qui a joué un rôle plus ou moins important dans sa vie. Peu à peu la personnalité de ce personnage complexe se dévoile. Elle est née dans les années 60 dans une ferme “pédagogique”, sa mère morte en couches et élevée par son père sans aucune contrainte. De cette enfance sauvage et libre, elle gardera des cicatrices physiques et mentales ainsi qu’une incroyable résilience. Chacune des personnes qui ont croisé sa route nous dresse un portrait en creux d’Astra, sa quête d’amour, sa relation exclusive avec son fils, ses failles, son courage, sa soif de liberté. Un beau roman, facile à lire, qui peut plaire à de nombreux lecteurs.

Roman “Le Pouvoir du chien”, de Thomas Savage

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Roman “Le pouvoir du chien”

Analyse de Françoise Pasco – 04/01/2023

Le Pouvoir du chien

         A quelque chose malheur est bon … en commençant à trier les livres de notre bibliothèque avant fermeture, j’ai découvert un roman américain qui se passe dans le Montana (j’adore!) et en lisant la quatrième de couverture, j’ai reconnu le sujet du dernier film de Jane Campion qu’elle a réalisé pour Netflix il y a quelques mois. Le film, toujours visible sur Netflix, est intéressant, bien qu’un peu lent, si cela vous intéresse je vous conseille de le regarder avant de lire le roman, car celui-ci est beaucoup plus fort comme c’est souvent le cas.
Dans les années 20 dans le Montana, deux frères exploitent un ranch dans lequel on élève d’immenses troupeaux de bovins. Phil, la quarantaine, bel homme, personnalité complexe, brillant dans tous les domaines, grand lecteur, musicien, très habile de ses mains, cultive une virilité exacerbée qui cache en réalité une homosexualité refoulée. Georges, son frère, au physique plus lourd, moins doué, gentil, introverti, épouse Rose, la veuve d’un médecin au grand cœur mais alcoolique, qui a fini pas se suicider. Rose a un fils Peter, intelligent, sensible, qui va fomenter une vengeance horrible contre Phil qui harcèle sa mère au point que celle-ci se perd dans la boisson.
Ce roman paru en 1967 aux USA, puis en 2002 pour la traduction française, est magnifique dans la description des paysages, l’analyse psychologique des personnages, la description de la vie à cette époque des cow boys dans ces immenses ranchs, la façon dont ces pionniers se sont débarrassés des indiens, le racisme, le machisme …
Très belle postface de Annie Proux.
Si vous le trouvez au fond d’un rayon de votre bibliothèque (ou sur Amazon), ne vous privez pas de le lire.

Biographie “La Fugue Theremine”, de Emmanuel Villin

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Biographie “La fugue Theremine”
par Françoise Pasco (B.P.T. de Sète), le 14 décembre 2022
Connaissez-vous Lev Sergueïevitch, dit aussi Lev Theremine, ce génial ingénieur et musicien soviétique qui, entre autres nombreuses inventions, a mis au point dans les années 1920 le premier instrument de musique électronique, le theremine, dont on joue simplement en bougeant les mains devant des antennes ? Pour découvrir l’histoire de sa vie extraordinaire, je vous recommande fortement la lecture de sa biographie, La Fugue Theremine, par Emmanuel Villin. Né en 1896, il adhère au communisme aux côtés de Lénine (à qui il fera découvrir son instrument), passe 10 ans aux USA où il profite des années folles pour s’enrichir, apprécier les plaisirs du capitalisme tout en communiquant quelques renseignements aux services d’espionnage soviétique. Forcé de rentrer au bercail à la fin des années 30, il est envoyé au goulag pour moins que rien (il a pris 8 ans, mais on dit que « pour rien, c’est au moins 10 ans »!) par les sbires de Staline. On l’en sort avant terme pour profiter de son talent d’inventeur : il invente des systèmes d’écoute, de surveillance … très utiles pendant la guerre froide. Malgré tout, il reste bolchevik jusqu’à sa mort dans les années 1990.
Pour découvrir la très belle musique créée par son instrument, que l’on entend par exemple dans Good Vibrations des Beach Boys, regarder la video :

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Roman “Ton absence n’est que ténèbres”, de Jon Kalman Stefansson

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Roman “Ton absence n’est que ténèbres”, de Jon Kalman Stefansson

Analyse par Françoise Pasco, le 23 mars 2022

 

Si vous aimez les grandes histoires d’amour qui finissent mal, bien sûr, si vous rêvez des paysages grandioses et sauvages de l’Islande, si vous appréciez la musique des années 70-80 (Bob Dylan, Leonard Cohen, Beatles …), la poésie de Hölderlin, si une pointe d’irrationnel et de mystère ne vous dérange pas, si vous n’avez pas peur de vous perdre un peu dans une foule de personnages et un récit ignorant toute chronologie (mais très habilement mené), alors plongez sans attendre dans ce très beau roman.

De quoi il parle ? Impossible à résumer, mais il nous raconte de magnifiques histoires de vie, d’amour, de mort, dans une petite communauté au bord d’un fjord encore sauvage, mais déjà guetté par l’invasion touristique, au Nord-Ouest de l’Islande.

Et si comme moi vous l’avez aimé, nul doute que vous aurez envie de découvrir d’autres romans de JK Stefansson, par exemple la trilogie Entre ciel et terre, La Tristesse des anges et Le Cœur de l’homme, dont certains personnages réapparaissent dans Ton absence

Roman “La Porte du Voyage sans retour”, de David Diop

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Roman “La porte du voyage sans retour”, de David Diop ( Ed. Seuil – 19/08/2021)

Analyse par Françoise Pasco, le 13/02/2022

  Le narrateur est Michel Adanson, naturaliste français du XVIIIème siècle. Il faisait partie de ces savants du siècle des lumières qui partaient sur des bateaux pour le bout du monde afin de découvrir des pays exotiques, leur flore, leur faune, mais aussi leurs peuples, qui étaient à la fois botanistes, zoologues, ethnologues, géographes … et dont le retour était souvent aléatoire.
Après ces études, il part pour le Sénégal, il y passe 5 ans, recueille et étudie plantes, arbres, animaux mais s’intéresse aussi à la sociologie du pays, ce qui n’est pas courant à l’époque où on considérait tous les indigènes de ces pays exotiques comme des sauvages, apprend le wolof.
Dans la première partie, sa fille Aglaé assiste son père dans ses derniers instants. A la mort de son père, elle hérite de toutes ses affaires, livres, écrits (encyclopédie de 160 tomes), plantes, outils de toutes sortes et trouve dans un tiroir caché un carnet dans lequel son père raconte une aventure amoureuse qui lui est arrivée pendant son séjour au Sénégal et qui l’a poursuivi toute sa vie ; là nous entrons dans la fiction.
Et c’est désormais Michel Adanson qui raconte. Dans la première partie de son récit, il voyage avec une escorte, bien sûr, des porteurs … et un jeune homme Ndiak, fils du roi de Waalo, qui lui sert de guide et l’aide dans ses recherches botaniques. Un jour un roi leur parle d’une jeune femme, sa nièce Maram, qui a disparu un jour, vraisemblablement enlevée par les chasseurs d’esclaves et déportée à Gorée, mais 3 ans plus tard un homme se présente à la cour du roi et raconte que Maram est revenue d’Amérique et vit dans un village proche de Gorée, où elle est guérisseuse.
Michel Adanson très intéressé par cette histoire décide de retrouver Maram et sous couvert d’une nouvelle campagne de recherche entreprend un voyage assez mouvementé pour la retrouver. Alors la jeune femme lui raconte la véritable version de sa disparition, et au fil du récit, Adanson tombe follement amoureux d’elle.
L’auteur nous transporte dans le Sénégal du XVIIIème siècle, encore sauvage, éléphants, lions … Forêts d’ébéniers … belles descriptions, dans un style ample, poétique.
Maram, belle, intelligente, est experte dans l’art de soigner par les plantes, un peu sorcière. Elle lui parle de son respect pour la nature, des esprits qui régissent leurs vies, de l’importance de son rab sorte d’ange gardien qui la protège et la conseille dans ses choix de vie. En bon scientifique rationnel, MA ne veut pas y croire mais il est ébranlé dans ses certitudes d’occidental catholique.
Le personnage du narrateur est émouvant, qui confie à sa fille le récit de cet amour qui l’a poursuivi toute sa vie, ses scrupules à faire de Maram sa maitresse ou sa femme, ses regrets et ses remords.
Et puis je me suis beaucoup intéressée à la petite histoire attachée à M. Adanson qui manifestement a intéressé aussi l’auteur puisqu’il y consacre 50 pages, avant d’entrer dans l’histoire elle-même. L’histoire d’Aglaé Adanson est liée à notre ville de Sète, mais serait trop longue à raconter ici ….