RENCONTRE AVEC ABIGAIL ASSOR AUTOUR DE LA NUIT DE DAVID –
Fin novembre 2024, Abigail Assor était invitée par la librairie de l’Ourse bleue à St Gély du Fesc pour y présenter son roman ” La nuit de David”. Catherine Jorgensen (stagiaire Bibl. St Clément de Rivière) était présente et en fait le compte-rendu ci-dessous –
Quelques éléments biographiques –
Au cours de la rencontre l’autrice a évoqué sa naissance et son enfance à Casablanca où se déroule son premier livre publié. Son désir de bouger « J’ai toujours su que je voulais partir » . Sa famille qu’elle adore, sa place de deuxième entre une fille et un garçon, ses souvenirs d’une enfance difficile et, à la fin de l’entretien « J’étais un enfant comme David». Elle souligne « l’enfance est terriblement difficile, on est soumis aux adultes, les cicatrices restent pour toujours »
Ses études de Lettres, son absence de projet, le premier roman refusé qui a permis « un basculement » et l’entrée dans le travail d’écriture. La Nuit de David l’a habitée longtemps. Elle révèle son angoisse lors de la parution du roman, comment sa famille peut-elle le recevoir ? Il y a ceux qui ne le lisent pas, ceux qui la soutiennent et sa mère qui a eu cette parole magnifique « Quelle imagination !»
Son deuxième roman ” La Nuit de David” – ( Gallimard – août 2024)
Un récit plus intime qui met en scène des jumeaux : Olive la parfaite qui suit les codes imposés par la famille et David le perturbateur, un enfant insupportable, inquiétant, peut être même dangereux selon sa mère. Un livre qui questionne la rapidité à mettre des étiquettes, la validité de la structure familiale. Le lecteur s’interroge : David est-il fou ? Au lieu de s’interroger sur ce qui rend cet enfant violent, la famille préfère en faire un enfant à problème.
Mais Olive le comprend et dans une nuit décisive alors qu’ils n’ont que 10 ans elle s’engage à accompagner son frère…
Abigail Assor ne révèle cette nuit qu’à la fin, ” J’ai bien réfléchi ” dit-elle. Et l’autrice évoque son travail d’écriture, le premier jet qui alternait une scène d’enfance et une scène de l’âge adulte, la critique de l’éditeur qui amène à retravailler la chronologie, les parties pour faciliter la lecture…
« David est ce qu’il imagine » : il veut être un train. Il se donne une identité, s’affirme dans sa différence « un jour je deviendrai un train » et un livre sur les trains l’accompagne, le conforte, lui fait oublier l’étiquette que lui collent ceux qui le rejettent : « ce n’est pas normal de relire toujours le même livre » dit la mère. Cette mère n’arrive pas à recevoir son fils tel qu’il est. Quand le psychiatre lui affirme que son fils n’a rien, elle refuse le diagnostic. L’écrivaine précise qu’elle a rencontré des pédopsychiatres pour écrire La Nuit de David, mais qu’elle a surtout travaillé sa propre expérience.
Mais, comme le dit Abigail Assor « il y a beaucoup de couches dans ce livre, un récit qui ne cesse de poser des questions, un récit dont les personnages sont ambivalents : la mère est-elle parfaite ou cruelle ? Quand l’enfance s’arrête t-elle ? La mère est elle victime de sa propre mère comme dans les poupées russes ? Que fait ce père absent ? Ce grand-père « de plage » à la parole juste, mais rare ? Olive la perfectionniste n’est-elle pas la plus malade des deux ? » Personne n’est un monstre dans l’histoire » déclare l’écrivaine.
C’est un livre très retenu qui évoque avec beaucoup de pudeur le système familial qui n’est ni français, ni marocain, éternel ? C’était risqué !
L’écriture, avoue l’autrice, a permis de prendre du recul. Mission accomplie : comme Abigail Assor les lecteurs s’interrogent sur cette famille, sur la leur, sur la famille en général et l’imagination de chacun va bon train.
Catherine Jorgensen (bibl. St Clément de Rivière)