“Dans l’épaisseur de la chair”, de J.M. Blas de Roblès

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Lors de la rencontre autour des livres du 17 octobre 2017, Françoise Pasco (BPT Sète) a présenté le roman “Dans l’épaisseur de la chair” de Jean-Marie Blas de Roblès,  publié en août 2017 aux éditions Zulma,

L’auteur : né en 1954 à Sidi bel Abbès, rapatrié en France métropolitaine en 1962 avec sa famille. Historien et philosophe, a enseigné au Brésil et en Chine. A écrit des nouvelles, de la poésie, des essais (archéologie en Afrique du Nord) et 5 ou 6 romans dont “Là où les tigres sont chez eux“, Prix Médicis 2008.

Ce roman nous raconte l’histoire de l’Algérie à travers la saga d’une famille d’origine espagnole, installée à Sidi bel Abbès depuis la fin du XIXème siècle. En cette rentrée littéraire, de nombreux livres parlent de l’Algérie, dont L’art de perdre, d’Alice Zeniter …
Cette histoire est vraisemblablement très inspirée de celle de sa propre famille. Genre : roman autobiographique ? Autofiction ?

Le narrateur, Thomas, divorcé, qui habite le Nord de la France (Paris?), profite de chaque vacance pour descendre à Carqueiranne chez ses parents. Son grand plaisir est d’accompagner son père, 93 ans, sur son pointu, dans des parties de pêche qui se passent depuis toujours selon des rites immuables. Mais un jour, au cours d’une discussion familiale, son père lui jette : « Toi, de toute façon, tu n’as jamais été un vrai pied-noir ! ». Thomas, choqué et perplexe, part le lendemain seul en mer, veille de Noël, mais horreur, il tombe à l’eau ; il s’aperçoit qu’il ne peut plus remonter à bord comme quand il était jeune et va donc passer de longues heures accroché au cordage de l’ancre. Entre son angoisse qui grandit et ses pensées autour de la phrase de son père, il se raconte et nous raconte l’histoire de sa famille en Algérie, et en particulier la vie de son père, études brillantes de médecine, guerre en Italie et en France, puis les « événements » et l’adaptation à une nouvelle vie en France.

J’ai aimé ce livre pour cette construction originale, pour le style à la fois travaillé et fluide, pour le ton, tantôt poétique, parfois humoristique, souvent émouvant et nostalgique pour les souvenirs d’enfance, les anecdotes truculentes du petit peuple de Sidi Bel Abbès, dur et hallucinant pour les épisodes de guerre. Ce roman est un hymne d’amour d’un fils à son père, un hombre courageux, altruiste, intelligent, aimant la vie par-dessus tout.

C’est un roman que l’on ne lâche pas, à recommander à tous.

L’Homme de miel, de Olivier Martinelli

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Par Françoise Pasco (BPT Sète) le 22 sept 2017

C’est mon grand coup de cœur de la rentrée. Dans ce roman, qui est plutôt un recueil de chroniques, Olivier nous raconte sa maladie, un méchant myélome qui lui est tombé dessus il y a 2 ans (“Tumeur en C7“), sa vertèbre cervicale toute neuve en titane, la rééducation de ses cordes vocales endommagées, les transports journaliers en ambulance à Montpellier (“mon ambulance est pleine de morts“), l’angoisse de l’avenir …

Bon, c’est pas drôle, je vous entend d’ici ! Et bien si, parfois c’est drôle, c’est toujours émouvant, c’est un formidable hymne à la vie, à l’amour, à l’amitié, le livre d’un homme qui a décidé de continuer à vivre, travailler, écrire, de se battre pour faire connaître et reconnaître son oeuvre littéraire : “L’année de mon cancer, j’ai continué à écrire, lire, aller au cinéma, écouter de la musique. J’ai continué à accepter les émotions, le bonheur et les larmes. L’année de mon cancer, j’ai continué à me révolter, j’ai continué à aimer. L’année de mon cancer, j’ai continué d’avancer, vaille que vaille.”.

Un beau livre, une écriture précise et ciselée, une belle leçon de vie …

Françoise de Sète

Joli roman pour la rentrée : Les Mémoires d’un chat, de Hiro Arikawa

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Les mémoires d”un chat, de Hiro Arikawa

par Françoise Pasco, le 21 août 2017 –

Bonjour à tout le monde ! Déjà la rentrée se profile et il va falloir choisir les nouveaux livres pour nos bibliothèques ! En voici un qui me paraît parfait pour cette reprise.
Déjà la couverture … on ne résiste pas !
C’est un très joli roman, émouvant et drôle, grave et léger. Nana est un chat errant adopté par Satoru. Entre eux beaucoup d’amour et une grande complicité. Mais Satoru doit se séparer de Nana et part rendre visite à d’anciens amis susceptibles d’adopter son chat. Nana nous raconte ces rencontres avec beaucoup d’humour et de psychologie féline, et les contacts avec leurs propres chiens et chats sont souvent croustillants. Ce road movie à travers le Japon nous fait découvrir à travers le regard de Nana les beautés de ce pays décrites avec beaucoup de poésie. Malgré la gravité du sujet, c’est un hymne à la vie, à l’amour et à l’amitié (humaine et animale !). Premier roman fort bien écrit, habilement construit, qui devrait émouvoir tous ses lecteurs. (Actes Sud, 325p., 22€)

“Les Vivants au prix des morts”, de René Frégni

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“Les vivants au prix des morts” par Françoise Pasco, le 5 juillet 2017

Ceux et celles qui ont participé en 2012 à l’AG de la CBPT organisé à Sète n’ont sûrement pas oublié le bel après midi passé en compagnie de René Frégni : ses talents de conteur, sa générosité, sa gentillesse, son érudition nous avaient passionnés.

Depuis, il a pris du galon, plusieurs fois invité de la Grande Librairie, il a droit ce mois-ci à une page entière du magazine Lire pour son dernier roman Les Vivants au prix des morts, sorti il y a quelques mois chez Gallimard.

Les Vivants au prix des morts, c’est l’annonce criée autrefois par les poissonnières de Marseille à la fin du marché qui bradaient leurs poissons et crustacés encore vivants « au prix des morts » !

Certes, on peut reprocher à René Frégni d’utiliser dans ses romans des épisodes de sa propre vie, des histoires liées à sa connaissance du milieu carcéral et des truands qui le peuplent grâce aux nombreux ateliers d’écriture qu’il a animés dans les prisons du Sud.

Dans celui-ci, il s’agit d’un bandit en cavale qui lui demande de l’aide et va l’entraîner dans une spirale infernale, à un moment où il n’aspirait plus qu’à jouir du bonheur de marcher dans sa chère Provence, d’admirer la nature qui s’éveille au printemps et d’aimer sa « fiancée des corbeaux », la douce et belle Isabelle.

Mais voilà, d’abord sa vie est un roman, et puis il parle si bien de la nature, de cette Provence qu’il adore, des fleurs, des arbres, de la lumière, des animaux et des petites gens qui la peuplent ; et puis ce questionnement malheureusement d’actualité : cette façon de vivre, contemplative, proche des beautés de la nature, cette confiance dans les qualités humaines perverties seulement par la pauvreté et l’injustice, n’est-elle pas une illusion alors que le monde est soumis à la violence, à la cruauté, au terrorisme … ? Et qui est réellement Kader, qui a détruit sa vie ?

A lire et à faire lire sans modération !

Françoise de Sète

La Sonate à Bridgetower, d’Emmanuel Dongala

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“La sonate à Bridgetower”, par Françoise Pasco, le 11 mai 2017

A la bibliothèque de Sète, bibliothécaires et lecteurs avaient beaucoup aimé en 2010 Photo de groupe au bord d’un fleuve, de Emmanuel Dongala.

Dans ce nouveau roman l’auteur nous raconte la vie très romancée de George Bridgetower, qui débarque à Paris en 1789 avec son père qui se fait passer pour un prince africain. Ils sont tous deux mulâtres et George est un très jeune virtuose du violon. Il a été l’élève du grand compositeur Haydn.

Quelques concerts à Paris le font connaître, mais la prise de la Bastille et les événements qui suivent les obligent à se réfugier en Angleterre où il deviendra le protégé du Prince de Galles. A Vienne, il devient l’ami de Beethoven qui écrit pour lui une magnifique sonate qu’ils joueront tous les deux. Mais une banale querelle met fin à leur amitié et la sonate initialement dédiée à « il mulatto Brischdauer, gran pazzo e compositore mulattico » deviendra la fameuse Sonate à Kreutzer (qui d’ailleurs ne la jouera jamais, la jugeant trop complexe!).

Ce roman mêle les aventures de ce personnage hors du commun aux événements de cette période troublée (révolution française, prise du pouvoir par Bonaparte …) et évoque d’importantes questions de société soulevées par les philosophes des Lumières : esclavage, racisme, féminisme…

George est fasciné par ces idées nouvelles, rencontre Lavoisier, Monge, Borda, Condorcet, Olympe de Gouges, et tous les grands musiciens de son temps.

Ce roman à l’écriture et la construction soignées est vraiment passionnant et susceptible d’intéresser par les sujets qu’il aborde (musique, histoire …) un large éventail de lecteurs.